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Entre l’aliment qui nourrit et le médicament qui guérit,
une zone vierge à forte valeur ajoutée s’est ouverte aux
industries agro-alimentaires. Pour elles, ces produits sont
les bienvenus en période d’abondance alimentaire où on
ne peut guère augmenter le volume des ventes mais
plutôt leur qualité.
La prégnance des discours médicaux et sanitaires autour
de l’alimentation, relayés par les pouvoirs publics,
en particulier à travers le programme national nutrition
santé, façonne un nouveau cadre social normatif
et prescriptif des conduites alimentaires. Selon les
catégories socioprofessionnelles, les pratiques alimen-
taires se construisent dans une tension entre un modèle
familial hérité, un modèle normatif social et la gestion
quotidienne de l’alimentation et de la santé.
La nourriture,
première médecine
L’alimentation a toujours joué un rôle dans le maintien
de l’homme en bonne santé. On sait, en effet, depuis
fort longtemps que certains nutriments (vitamines,
minéraux…) doivent être obligatoirement apportés
par l’alimentation puisque notre organisme ne peut les
fabriquer. L’émergence du discours nutrition santé en
terme de consommation alimentaire remonte à la nuit des
temps. Nos grands-mères ne vantaient-elles pas déjà les
vertus naturellement préventives de certains aliments ?
L’être humain a toujours cru en la magie des aliments.
Aucun argument rationnel ne pourra chasser de son esprit
cette croyance archaïque selon laquelle, dans une
certaine mesure, on devient ce que l’on mange. L’homme
obéit à ce principe d’incorporation et cherche des
substances « magiques » qui, si possible, agissent comme
une médecine douce. Les aliments santé, qui dans le fond
n’ont rien inventé, répondent donc parfaitement aux
attentes des consommateurs en quête d’immortalité. Ils
ont donné naissance à différentes dénominations telles
que « aliments fonctionnels », « nutraceutiques »,
« alicaments », « pharmafoods » qui ont entretenu la
confusion dans l’esprit du consommateur. A l’argument
santé s’est ajouté plus récemment l’argument beauté avec
les « cosmétofoods ». Le consommateur est vraiment en
droit de s’interroger sur ce qu’il absorbe : un cosmétique,
un aliment ou un médicament (même si les aliments enri-
chis en fibres, en calcium… n’ont pas le droit en France
de faire état d’allégations thérapeutiques) ?
Les aliments à
connotation santé
ont de l’avenir
Les liens entre alimentation et santé sont confirmés
par des recherches nutritionnelles de plus en plus
poussées. Le vieillissement de la population et
l’aspiration croissante des consommateurs au bien-être
et au maintien d’un bon état de santé les amènent à
être de plus en plus conscients du rôle de l’alimentation
dans ce domaine. Régulièrement dans les enquêtes, ils
expriment davantage leur désir de mieux connaître le
rôle des aliments sur leur santé, souhait qui pourrait
être partiellement comblé par les allégations santé.
De plus, depuis les affaires de la « vache folle », de la
dioxine, des pesticides, des OGM…l’inquiétude grandit
dans de nombreux esprits. Connaissant moins bien les
aliments santé, puisque la plupart d’entre eux
sont issus de transformations industrielles, le consom-
mateur est désormais très demandeur d’informations
nutritionnelles et de garanties. Il est d’ailleurs prêt à
payer un aliment santé plus cher, sous prétexte qu’il est
à ses yeux bénéfique pour sa santé.
Quel est l’impact à long terme de la prise de ces
aliments à valeur ajoutée santé sur notre forme et notre
longévité ? Des études cliniques, calquées sur celles
des industries pharmaceutiques, apportent des preuves
scientifiques du bénéfice de ces aliments sur la santé.
En conséquence, l’apparition du concept d’aliment
santé semble être une évolution inéluctable
susceptible d’influencer l’ensemble des choix et
des comportements alimentaires. Ce concept renferme
incontestablement des promesses permettant d’espérer
une réduction de certaines pathologies (cancers,
maladies cardiovasculaires…).
Le rôle
protecteur
de l’alimentation
On dispose encore de très peu de preuves sur le fait que
tel ou tel composant des aliments a un effet préventif
pour une pathologie. La seule chose qui soit établie,
c’est qu’une alimentation riche en fruits et légumes
joue un rôle protecteur face à certains dérèglements
qui sont au cœur des maladies cardio-vasculaires et des
cancers. Protection « antioxydante » des vitamines,
prévention du cancer du côlon par les fibres, calcium et
lutte contre l’ostéoporose, existence au sein des
graisses d’acides gras indispensables au cerveau,
comme les oméga 3…
Il est aujourd’hui établi que des substances d’origine
alimentaire peuvent intervenir dans l’expression des
gènes. Des études l’ont notamment montré pour les
processus à l’origine des cancers, par exemple.
Les découvertes ne cessent de révéler la variété des
rôles des différents nutriments et leurs interactions.
Il en va ainsi de la transformation par l’organisme de
la vitamine D qui permet d’obtenir le transporteur du
calcium vers l’os : sans vitamine D, consommer une
grande quantité de calcium ne sert pratiquement à rien.
Selon la plupart des experts internationaux, une
alimentation saine doit intégrer au moins 2 à 4
portions de fruits et 3 à 5 portions de légumes par jour,
ce qui correspond à au moins 500 g.
EM
n°31 mai/juin 2010
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