chez le sujet âgé », « lutter contre la douleur iatrogène,
autrement dit les gestes thérapeutiques qui engendrent
de la douleur », enfin « prendre en charge la douleur
chez les personnes atteintes de pathologies men-
tales ».
Pour les médecins spécialisés dans la prise en charge de
la douleur, la demande des patients ne va pas cesser
d’augmenter, en raison notamment de l’accroissement
de la longévité. A l’hôpital, les moyens et le personnel
des centres anti-douleurs demeurent insuffisants pour
répondre à l’accroissement de la demande. De ce fait, il
est devenu indispensable ces dernières années, d’opti-
miser les prises en charge localement, en améliorant
notamment la coopération avec les associations de
patients, les réseaux de soins et en développant l’édu-
cation thérapeutique.
une question de
société
Beaucoup de patients attendent parfois des années
avant un diagnostic, et finissent par accepter leur dou-
leur comme une fatalité. Après des mois, parfois des
années de douleur chronique, les personnes se coupent
de leur entourage, famille, collègues... Ils en viennent
à ne plus pouvoir assumer un travail. La chronicité
s’installe, la douleur entraîne la désinsertion et c’est à
partir de cet instant qu’elle coûte le plus cher. La dou-
leur doit aussi être traitée comme une question de
société à part entière, en raison notamment des inéga-
lités et des situations d’exclusion qu’elle entraîne. Les
maladies génératrices de douleur chronique sont des
causes majeures de dépendance et le seront de plus en
plus avec le vieillissement de la population. Mais la
douleur n’atteint pas que les personnes âgées, puisque
beaucoup de personnes souffrant de douleurs neuropa-
thiques ont moins de 55 ans et une grande partie d’en-
tre elles sont en arrêt de travail depuis plus de 6 mois.
De plus, les inégalités s’accroissent avec la douleur. Il
faut savoir que les femmes et les hommes ne vivent pas
la douleur de la même façon : les femmes l’expriment
davantage mais en ont moins peur, à l’inverse des
hommes. La ruralité comme la pauvreté renforcent
l’inégalité d’accès aux soins et structures adaptés.
Le rôle crucial des
associations
Les solutions à rechercher sont d’ordre médical, humain
mais aussi socio-économique. L’objectif est qu’aucun
malade ne puisse plus se dire qu’« il n’y a rien à faire ».
Parmi les enjeux les plus urgents de la lutte contre la
douleur apparaissent donc : la lutte contre les inégali-
tés sociales liées à la douleur, la reconnaissance du rôle
des patients, la formation des médecins et des autres
professions de santé, la prise en compte de la douleur
silencieuse chez les populations fragiles, mais aussi
une meilleure organisation du parcours de soins, avec
une implication plus forte des médecins généralistes
dans la prévention, le diagnostic et la prise en charge.
Parler de la douleur est généralement le premier pas
vers son soulagement. Le rôle des associations de
malades est de les écouter, de les aider à reprendre
confiance, à redevenir acteurs de leur vie et de se
réconcilier avec leur entourage, en cessant de voir la
douleur comme une fatalité. Leur travail est complé-
mentaire de celui des médecins. Ce que les patients
n’osent pas ou n’ont pas le temps de dire au médecin,
les répercussions de la douleur sur leur vie sociale et
affective par exemple, ils le disent aux associations.
Les patients atteints de douleur chronique concourent
eux aussi depuis plusieurs années, par le biais de ces
associations, à l’information du public et à l’améliora-
tion des soins.
Toutes les professions ne sont pas égales face à la dou-
leur non plus. Il est temps au 21
ème
siècle de connaître
les professions qui génèrent le plus d’incapacités dou-
loureuses. Il importe aussi de sortir d’une conception
du handicap culturellement trop centrée sur la lésion
visible. Les personnes victimes de la douleur sont le
plus souvent invisibles pour la société.
L’environnement fonctionnel pourrait être adapté, qu’il
s’agisse des transports en commun, du poste de tra-
vail… Dans des professions comme celles du bâtiment,
il faut pouvoir proposer des évolutions de carrière qui
évitent l’aggravation puis la chronicisation de la dou-
leur.
EM
n°40 août / septembre 2012
(5)
La douleur en chiffres, en France :
62%
des personnes souffrant de douleur chronique
estiment que cette douleur affecte directement leur
situation professionnelle, au risque même de perdre
leur emploi.
en moyenne, 24 % des personnes concernées sont
incapables de travailler en raison de la douleur. par
exemple, les lombalgies représentent la première cause
d’inaptitude au travail chez les moins de 45 ans (source
inserm).
pourtant, 73 % d’entre elles souhaitent prendre une
part active dans la société. encore faut-il être en mesure
d’adapter l’environnement fonctionnel de ces personnes
(
transports, poste de travail…) et d’adapter le parcours
professionnel des personnes souffrantes afin d’éviter
l’aggravation et l’installation de douleurs chroniques.
environ un tiers des personnes atteintes de douleurs
chroniques pensent qu’elle a un impact négatif sur la
famille et les amis et 28 % ressentent un isolement
social.
seulement 43 % des médecins interrogés affirment
connaître la conduite à tenir en présence d’un patient se
plaignant de douleur après traitement.