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EM

n°53 fév. / mars 2016

(16)

actualités

C’est un examen systématique qui doit être pratiqué très

régulièrement car on conserve le VIH, à vie, dans son corps

au niveau de réservoirs dormants. Pour l’instant, donc, on

ne guérit jamais complètement du SIDA, d’où l’importance

de bien suivre son traitement de trithérapie et de faire ses

contrôles. En effet, un traitement par plusieurs antiviraux

est nécessaire car le virus possède la propriété de muter

très facilement. Il est donc nécessaire de le bloquer par

un ou plusieurs autres antiviraux, s’il devenait résistant à

l’un d’entre eux.

Ces mutations sont l’une des conditions qui font que

la personne infectée ne peut pas fabriquer d’anticorps,

de plus le VIH s’attaque principalement aux systèmes

immunitaires...

Les contrôleurs élites

Pourtant, très rarement (moins de 1% de la population),

certaines personnes qui ont été contaminées par le VIH

ont, sans traitement, une charge virale plus ou moins

détectable, mais le SIDA ne se manifeste pas. Les

contrôleurs maîtrisent l’infection sans aucun traitement.

Cela signifie que l’organisme a les capacités de se défendre,

sans pour autant éliminer totalement le VIH. Parmi les

hypothèses avancées, ces sujets présenteraient un taux

de lymphocytes T CD8 très actifs qui reconnaissent les

cellules infectées par le VIH et les détruisent empêchant

ainsi sa réplication, ou encore auraient une résistance

du site CD4 des lymphocytes T à l’attaque virale. Ces

capacités exceptionnelles seraient d’ordre génétique.

Fondamentalement, cela montre qu’un organisme humain

peut stopper spontanément une infection au VIH, sans

traitement, ce qui ouvre plusieurs voies qui ne peuvent

être que d’origine immunologique directe ou indirecte.

La compréhension des mécanismes de la maladie

s’améliorant, les objectifs fixés par ONUSIDA sont

ambitieux, à l’horizon 2020 : 90/90/90. Ce qui signifie 90%

des personnes infectées sont dépistées, 90% des personnes

dépistées sont traitées,

et 90% des personnes

traitées ont une charge

virale indétectable. Les

étapes les plus difficiles

étant de dépister les

personnes infectées qui l’ignorent et d’assurer une parfaite

observance du traitement qui risque d’être négligé, dès

que la charge virale devient indétectable. Pour atteindre

ces résultats plusieurs facteurs peuvent être mobilisés

en commençant par la prévention et le dépistage. En

effet, le premier acte de prévention est l’utilisation du

préservatif en toutes circonstances. Mais dans certains

pays le niveau d’éducation est insuffisant et l’accès aux

moyens de prévention classique est parfois difficile. Les

recommandations sanitaires proposent alors la circoncision

qui a permis de faire baisser les risques de contamination

de 60% dans l’Afrique subsaharienne. En ce qui concerne

le dépistage, il existe depuis quelques semaines un test de

dépistage dispensé librement en pharmacie et que l’on peut

pratiquer chez soi. Ce qui permettra d’améliorer le score et

de se rapprocher de l’objectif de 90% proposé par ONUSIDA.

Les nouveaux espoirs

Parmi les pistes immédiatement disponibles figurent les

antirétroviraux

. Basés sur la compréhension de la biologie

du SIDA, ils permettent une réduction de la charge virale

qui peut être maintenue au dessous du seuil de détection.

L’

action sur les réservoirs

latents de virus. A l’état

dormantes, certaines cellules servent de réservoir au

virus et restent relativement indétectables. Une bonne

connaissance de cette partie de la chaine biologique

pourrait permettre de réactiver ces cellules en les rendant

détectables afin de les détruire.

La

thérapie cellulaire

, permettrait de traiter le SIDA en

administrant au patient des lymphocytes T CD4+ rendus

résistants après une manipulation génétique. En effet, en

2012 deux chercheurs, prix Nobel de Médecine, ont réussi

à reprogrammer des cellules matures pour leur redonner la

potentialité de cellules souches. Au vu de ces possibilités,

une voie de recherche est partie de l’observation d’un

patient berlinois atteint du SIDA et qui a reçu, par un

heureux hasard, une greffe de moelle osseuse dont les

lymphocytes naturellement porteurs d’une mutation

génétique étaient parfaitement résistants au VIH.

Le

vaccin thérapeutique

consiste à administrer une

protéine qui présente des analogies avec les protéines

du VIH afin de relancer la fabrication des anticorps.

Pendant plusieurs années, les recherches ont semblé

stagner. Mais l’espoir renaît lorsqu’une start-up française,

BIOSANTECH, basée à Sofia-Antipolis a reçu pour la 1

ère

fois en 2013 l’autorisation de réaliser un essai clinique en

phase 2a. En octobre 2015 les résultats présentés sont très

encourageants car sur 12 malades volontaires, 4 ont vu leur

charge virale descendre autour du seuil de détection alors

que le traitement de trithérapie était stoppé. Le principe

repose sur un schéma immunitaire classique : lors de

l’infection le VIH produit la protéine TAT qui va perturber

le système immunitaire. Il a donc été préparé une protéine

TAT de synthèse nommée TAT OYI qui, elle, va permettre

la fabrication d’anticorps qui reconnaîtront également la

vraie protéine TAT. Une étude clinique en phase 2b devrait

démarrer en 2016 et un vaccin thérapeutique devrait être

commercialisé pour 2017.

D’autres pistes sont également explorées, et notamment

l’administration d’un virus atténué, ce qui est la stratégie de

la société Theravectys. Le virus atténué va forcer le système

immunitaire à réagir et à produire des anticorps anti-VIH.

L’ ANRS (Agence Nationale de Recherche sur le Sida et les

hépatites) mise une stratégie combinée (PRIME-BOOST)

permettant une immunisation thérapeutique associant un

vaccin ADN (GTU-MultiHIV B) suivi d’un vaccin lipopeptides

(LIPO-5) dans le contrôle de la réplication virale.

En conclusion, il apparaît que la solution immunitaire

offre le plus d’espoir et elle s’oriente vers la mise au point

d’un ou de plusieurs vaccins faisant intervenir différents

mécanismes. Rendez-vous est donné d’ici 15 à 18 mois.

90

%

charge virale

supprimée

90

%

sous traitement

90

%

dépistés

Photo en microscopie électronique

montrant des ARN-VIH1 (en vert)

bourgeonnant à partir d’un

lymphocyte T CD4+ infecté (en rose)

© Photo Credit: Cynthia Goldsmith, Centers for Disease Control -

Public Health Image Library