Previous Page  16 / 24 Next Page
Information
Show Menu
Previous Page 16 / 24 Next Page
Page Background

EM

n°51 juin / juillet 2015

(16)

actualités

de requin : le squalène. Précurseur du cholestérol, il se

fixe sous forme d’un nanocomplexe au principe actif,

formant ainsi un système stable et performant.

Et aujourd’hui ?

Le Professeur Couvreur, titulaire d’une cinquantaine de

brevets, a créé avec d’autres scientifiques une structure

de recherche Bioalliance (1999) qui a mis au point

un nanomédicament. Répondant à ce critère, celui-ci

est composé de deux parties : le principe actif, la

doxorubicine, anticancéreux, et un nanopolymère issu

d’une colle biodégradable utilisée en chirurgie. L’intérêt

est de permettre de traiter, en dernier recours, des

tissus mous cancéreux comme le foie (hépatocarcinome)

qui ne peuvent plus être traités ou sont résistants aux

traitements de première intention, sauf à augmenter les

doses au risque de voir apparaître une toxicité cardiaque

très importante. L’intérêt du nanomédicament dans le cas

de l’ hépatocarcinome est de permettre une concentration

beaucoup plus importante au niveau du foie avec un

meilleur ciblage sur les cellules cancéreuses. En effet les

tissus cancéreux génèrent un processus inflammatoire.

Cet état entraine une vascularisation plus importante et

une plus grande perméabilité vasculaire. C’est cette faille

biologique de la cellule cancéreuse qui est exploitée par

le nanomédicament. On augmente alors la concentration

dans le foie, on diminue la toxicité cardiaque, on peut

donc augmenter les doses et avoir une puissance d’action

plus beaucoup plus importante.

L’efficience peut encore être améliorée en fixant sur

le nanosupport un marqueur caractéristique de la

cellule cancéreuse, si bien que l’anticancéreux va être

conduit jusqu’aux portes de la cellule cancéreuse. Ce

modèle, qui correspond à un nanomédicament de

première génération, a permis la mise au point d’un

nanomédicament à usage humain qui entre actuellement

dans le protocole d’un essai clinique hospitalier.

De nouvelles

perspectives

Une autre application très intéressante peut être faite

dans le cas des accidents vasculaires cérébraux (AVC) lors

desquels les dégâts sont tels que la micro-circulation des

tissus nerveux est très altérée du fait des débris liés à

l’ AVC. Il a donc été imaginé une technique consistant à

utiliser une molécule présente dans le cerveau et qui est

très protectrice : l’adénosine, et de la coupler au squalène

dérivé de l’huile de foie de requin, biocompatible, afin de

préserver la micro-circulation. L’adénosine ne pouvant

être utilisée seule car très rapidement éliminée, elle

est donc associée au squalène qui lui permet d’avoir

une durée d’action beaucoup plus importante au niveau

cérébral. Les nanoparticules sont injectées lors de la

reperfusion des zones lésées. Les résultats obtenus sont

très encourageants. Cette méthode trouve également des

applications dans les traumatismes de la moelle lors des

accidents de la circulation.

D’autres domaines d’investigation peuvent être attendus,

notamment en génétique. Puisqu’il devient possible

d’atteindre la cellule, il est alors envisageable d’y faire

pénétrer des brins de matériel génétique, des acides

nucléiques destinés à la réparation cellulaire ou à la

régulation de gènes.

Les nanomédicaments peuvent également trouver des

applications dans le domaine chirurgical en permettant de

mieux cibler le tissu à réséquer.

Le domaine de la radiothérapie est également concerné.

Le principe est le même que pour les autres protocoles. On

administre des nanoparticules qui supportent un ligand.

Celles-ci vont aller se concentrer dans les tissus cancéreux

grâce à ces marqueurs. Une fois en place, le radiologue

va pouvoir focaliser son faisceau, d’une part, et d’autre

part exploiter le pouvoir les nanoparticules qui vont jouer

un rôle d’amplificateur. Les doses de rayon administrées

pourront être moindres avec une efficience accrue.

Enfin, les nanomédicaments ont des applications dans

l’aide au diagnostic et même dans la prévention. Mais

les attentes se tournent davantage vers l’espérance

d’une médecine personnalisée. En effet, un médicament

« classique » est mis sur le marché après avoir traversé

4 phases de protocoles d’études, montré une meilleure

efficacité par rapport aux autres médicaments de sa classe

thérapeutique, démontré son innocuité relative (car tous

les médicaments sont des toxiques en puissance surtout

lorsqu’ils sont mal utilisés) et subi toutes les études

pharmacocinétiques pour définir une posologie plus ou

moins adaptée, mais relativement standard et identique

pour tout le monde. Dans le cas qui nous préoccupe, il peut

être tenu compte de la carte génétique du malade et avoir

une approche prédictive et/ou une approche préventive

de la maladie, car comme nous l’avons vu plus haut, la

taille des nanomédicaments leur confère des propriétés

physico-chimiques et spatiales surprenantes permettant

d’atteindre les noyaux cellulaires où se produit la synthèse

protéique. Pourra-t-on, ainsi, « corriger » une pathologie,

avant qu’elle ne se manifeste ?

GRANDEURS ET MESURES

»

»

millimètre

1 mm = millième de mètre = 10

-3

m

»

»

micromètre

1

m

m = millionième de mètre = 10

-6

m

(taille d’une bactérie ou cellule humaine)

»

»

nanomètre

1 nm = un milliardième de mètre = 10

-9

m

(taille d’un atome d’hydrogène : 0,1nm)

»

»

picomètre

1 pm = 10

-12

m

(taille du noyau de l’atome d’hydrogène)