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n°51 juin / juillet 2015
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En 2040, les personnes âgées dépendantes seront plus
de deux millions. C’est dire l’effort que la collectivité devra faire
pour mettre en place des solutions leur permettant de terminer
leur vie dans de bonnes conditions. L’ enjeu est tout aussi déterminant pour
les aidants familiaux dont la vie quotidienne est difficile car la prise en charge
d’un proche en perte d’autonomie a souvent un effet sur leur propre santé.
Par le Docteur Rémy Clément
armi les 8 millions de Français qui se trouvent en situation
d’aidant, 4,3 millions le sont auprès d’un proche âgé.
La fonction remplie par ces millions d’anonymes est
fondamentale. Elle est difficile, voire éprouvante.
Et que dire quand l’aidant n’est autre qu’un membre de
sa famille ! A un certain stade d’évolution de la maladie
d’un parent ou de sa dépendance, l’angoisse et l’inquiétude
submergent l’aidant familial (très souvent une femme). Face
à la pénibilité de cette situation, l’aidant doit apprendre
à déléguer et partager ce fardeau à la fois physique et
psychologique avec des tiers et des professionnels de
santé. Car il y va aussi de sa santé.
On ne s’en préoccupe pas assez mais la santé des aidants
familiaux est un problème de santé publique avec des
enjeux économiques et sociaux majeurs. Les conséquences
peuvent être lourdes pour ceux qui n’ont que de faibles
moyens. Le prix à payer face à la perte d’autonomie d’un
proche dépend surtout des ressources familiales. Ce prix est
plus élevé pour les groupes sociaux dont les revenus sont
les plus faibles. Dans ces milieux, faute de possibilités et
de moyens financiers pour accéder aux services à domicile,
les soins envers les plus dépendants sont le plus souvent
relégués aux « femmes de la famille ».
On comprend l’enjeu essentiel des politiques publiques
dans ce domaine : faire en sorte de mieux répartir la charge
entre les sexes et les milieux sociaux. Ce qui signifie rendre
accessible à tous des services à domicile de qualité et non
se reposer sur l’aide bénévole.
Partant de ce constat, le gouvernement a fait de
l’amélioration du quotidien des aidants et des aidantes,
l’une des priorités de la loi d’adaptation de la société au
vieillissement.
Les professionnels de santé eux-mêmes dans leur
accompagnement d’un nouveau paradigme du monde
de la santé vont devoir également s’adapter à ces deux
enjeux majeurs liés à l’allongement de la durée de vie des
patients : l’accompagnement optimisé de patients de plus
en plus chroniques et l’amélioration de la prise en charge
du handicap lié à l’âge.
Parce que la réalité économico-sanitaire fait que les
proches des patients sont de plus en plus impliqués, une
réflexion rigoureuse et transversale autour de la relation
aidant/aidé devient indispensable pour faire évoluer
qualitativement la prise en charge des personnes en perte
d’autonomie et le soutien à apporter aux aidants.
Dans la maladie d’Alzheimer par exemple, le besoin de suivi
du patient est tout aussi prégnant que l’accompagnement
de l’aidant, trop souvent le grand oublié de la prise en
charge. C’est de la responsabilité des réseaux de soins
et des acteurs de santé que de répondre à ces différents
besoins de manière professionnelle tant sur le plan
technique qu’humain.
La dure vie
des aidants
Etre aidant demande un investissement et un engagement
fort. Cette charge de travail demande alors une
réorganisation de sa vie personnelle et/ou professionnelle.
Le manque de temps et de disponibilité ont un impact sur
la propre santé de l’aidant qu’il néglige du fait d’un rythme
intense au quotidien.
L’aidant se préoccupe souvent de la santé de son proche
avant de penser à sa propre santé. Toute son énergie est
donnée à la personne qu’il aide pour ne pas culpabiliser et
ne pas être frustrée.
L’aidant ne doit pas lui-même sombrer et doit réagir dès
qu’il détecte les premiers signes d’épuisement : stress,
fatigue physique et mentale, insomnie, repas déséquilibrés,
maux de tête, état dépressif, réduction de l’activité
professionnelle, consommation de psychotropes… La
dé-socialisation de l’aidant a des effets particulièrement
délétères qui retentiront sur le parent dépendant.
Ainsi, préserver une vie sociale pour exister en dehors de
son rôle d’aidant, se donner un espace de liberté, et se
permettre de souffler est une des missions que l’aidant
doit également anticiper. Famille, ami(e)s, voisin(e)s,
accueils de jour, auxiliaires de vie, voire hébergements
temporaires, télé assistance…, sont autant de solutions
qui s’offrent à lui pour reprendre le dessus.
Il est essentiel aussi de partager ses difficultés et ses