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EM

n°54 mai / juin 2016

(7)

i l’on considère les infections saisonnières courantes :

‬angines, rhinopharyngites, bronchites..., elles ne sont pas

toutes dues à une bactérie mais, souvent, à un virus sur

lequel les antibiotiques sont sans effet. Ce constat réalisé

il y a plusieurs années, avec celui de l’augmentation de

l’antibiorésistance, a modifié les protocoles de traitement

des infections par le corps médical. C’est la raison pour

laquelle, en cas d’infection, votre médecin prescrit d’abord

un traitement symptomatique (qui permet à l’organisme de

générer des anticorps pour se débarrasser du virus) et si

l’infection ne s’estompe pas au bout de 5 à 6 jours, alors

les antibiotiques entrent en jeu et ils doivent pris à la

posologie indiquée et sur toute la durée prescrite, même si

on va mieux. En effet, outre l’abus des antibiotiques il y a

plusieurs dizaines d’années pour traiter sans discernement

toutes infections, la non observance du traitement, peut

également être la cause d’une antibiorésistance dans la

mesure où l’arrêt du traitement survient alors que des

germes sont encore présents ; germes qui peuvent soudain

devenir résistants à l’antibiotique qui a fait l’objet de

l’interruption de traitement.

Un phénomène

mondial

Selon l’OMS, près de 50% de la production des antibiotiques

est destinée aux animaux. L’utilisation massive des

antibiotiques dans les élevages comme facteurs de croissance

a permis d’observer, comme dans tout organisme vivant, et

donc chez l’homme, des phénomènes de résistances. Cette

pratique ne fut interdite en Europe que depuis 2006.

Le phénomène d’antibiorésistance a été observé dès

les années 50. Il est en augmentation croissante depuis

plusieurs dizaines d’années et touche tous les pays avec des

proportions plus importantes dans les pays du sud. Cette

situation préoccupante contraint les autorités à prendre des

mesures plus ou moins porteuses et suivies selon les pays...

Aujourd’hui, les risques les plus importants se trouvent dans

les centres de soins hospitaliers ou les cliniques, du fait des

maladies dites nosocomiales. Ce sont des infections liées

à l’hospitalisation dont les causes peuvent être diverses,

mais pas toujours inhérentes au personnel soignant ou aux

instruments et accessoires (cathéters, sondes), ou encore à

la ventilation, à l’eau, mais au malade lui-même, affaibli,

porteur de germes. Les victimes des infections nosocomiales

sont des malades de plus de 65 ans, ou de très jeunes

enfants, des patients immunodéprimés, et d’une manière

générale des patients en état de faiblesse prolongée.

Les principaux

germes

Ils sont en cause sont dans près de 50% des cas des

affections nosocomiales.

L’ Escherichia coli, présente dans tous les intestins.

Elle est responsable, entre autre, de la véritable pollution

des plages. L’infection est essentiellement intestinale et

provoque des diarrhées importantes avec des saignements

possibles. Elle survient lors de l’ingestion d’aliments

contaminés (les steaks hachés sont souvent mis en cause).

L’épidémie nécessite la mise en place de mesures de santé

publique. L’évitement passe par des actes de prévention :

se laver les mains avant chaque repas, cuire la viande à

cœur (surtout pour les enfants), laver soigneusement les

légumes, laver les instruments de cuisine, surtout ceux

utilisés pour les aliments organiques (viandes), ne jamais

boire d’eau qui n’a pas été contrôlée (puits, source...), et,

dans les pays étrangers, boire de l’eau en bouteille fermée.

Le pseudomonas aeruginosa qui se développe en milieu

humide dans les conduites d’eau, les robinets.

Et enfin, le célèbre et redoutable staphyloccocus aureus

(staphylocoque doré) présent dans les muqueuses de la

gorge et du nez, chez 30% des personnes sans qu’une

pathologie ne se manifeste. Il peut être responsable

d’infections alimentaires, cutanées, muqueuses. Il peut

donc atteindre le système respiratoire ou digestif, la sphère

génitale ou ORL. Le danger est l’extension de l’infection

en septicémie. Une évolution rapide qui peut générer des

foyers aux niveaux cardiaque, articulaire, osseux ou même

cérébral... Ainsi logés dans les tissus profonds, ces germes

deviennent très difficiles à éliminer.

Ceci explique donc que les infections nosocomiales

s’installent lors de traitements invasifs : chirurgie,

perfusion, sonde urinaire ou trachéale... Mais cela dépend

aussi de la durée du séjour, du type d’établissement, du

profil du patient et, bien sûr, de son état général...

Le mécanisme

de la résistance

bactérienne

En 2009, les équipes associées de l’institut Pasteur, de

l’ INSERM, du CNRS avec la faculté de médecine de Limoges

ont permis de mieux comprendre, pour la première fois, les

mécanismes moléculaires de l’antibiorésistance.

Lorsqu’un antibiotique est au contact d’une bactérie,

il va, lui-même, générer la fabrication par la bactérie

d’une enzyme qui va révéler les gènes de résistance.

Ceux-ci sont alors transcrits sur une structure génétique,

l’ intégron, que les bactéries s’échangent comme une

information. Cette information est ensuite intégrée

dans la bactérie qui transmet les gènes de résistance

aux générations suivantes. Les gènes de résistance sur

l’ intégron sont hiérarchisés, et les plus récents (au début

de la séquence) sont activés, tandis que d’autres (en fin

de séquence) sont dormants. Les bactéries qui possèdent

la bonne séquence lorsque l’antibiotique « X » se présente

deviennent résistantes. Lorsque l’antibiotique « Z » entre

en contact, un réagencement de l’ intégron est effectué, et

le gène de résistance à « Z », qui peut déjà être présent à

l’état dormant, devient activé et prioritaire. Les bactéries

deviennent multirésistantes à « X » et « Z ».

Ainsi pour reprendre un autre schéma biologique, celui de

la vaccination, tout se passe comme si l’antibiotique se

comportait comme un antigène vis-à-vis de la bactérie, la

bactérie se mettant à fabriquer des anticorps destinés à

le détruire et, de plus, la bactérie conserve la mémoire du