Previous Page  8 / 24 Next Page
Information
Show Menu
Previous Page 8 / 24 Next Page
Page Background

EM

n°56 novembre / décembre 2016

(8)

actualités

perceptions sensorielles et notamment celles relatives à

la douleur. C’est pourquoi depuis quelques années, dans

presque tous les pays européens (20 sur 28), existe un

cannabis dit « thérapeutique » par opposition au cannabis

dit « récréatif » objet d’une légalisation éventuelle.

Le cannabis peut être utilisé sous plusieurs formes : les

sommités fleuries séchées, la résine, l’huile.

Selon le mode d’administration et la façon de l’utiliser

(séché et fumé, seul ou dilué au tabac, par exemple), le

cannabis provoque des effets dont certains sont recherchés

par les usagers : euphorie modérée, sensation de bien-être,

suivie d’un état de stimulation puis de somnolence.

Sur le plan toxicologique, il provoque une régression de la

mémoire court terme et des capacités d’apprentissage. Il

allonge les temps de réaction (modification des perceptions

temporelles) et freine la concentration. Il augmente la

fréquence cardiaque et tarit la sécrétion salivaire (sensation

de bouche sèche). Chez certaines personnes il peut

provoquer des hallucinations. Chez d’autres, prédisposées,

lorsque la consommation est régulière, il peut générer des

troubles anxieux, dépressifs et accompagner ou déclencher

des troubles psychiatriques. Les conséquences sur le plan

sociétal sont importantes si l’usager négligent ou méconnaît

ces effets néfastes. Concernant les accidents de la route,

ceux-ci sont multipliés par deux en cas de consommation

de cannabis. Ils sont multipliés par 14 en cas d’association

avec de l’alcool. En 2000, près de 200 accidents mortels

ont eu pour cause une imprégnation au cannabis. Ses effets

sont d’autant plus pernicieux, que la demi-vie d’élimination

des cannabinoïdes absorbés est très longue : de 20 à 36

heures. Cela signifie qu’au bout de 24 heures il reste dans

le corps près de la moitié de la quantité et que les effets

(néfastes) peuvent toujours se manifester.

Jusqu’à il y a quelques années seulement, le cannabis était

considéré comme une substance psycho-active avec des

effets délétères importants et sans application médicale. Il

a donc été classé comme stupéfiant aux côté des opiacés,

de l’héroïne, des amphétamines etc...

Avec l’amélioration des connaissances, tant en

pharmacologie qu’en réceptologie, il a pu être mis en

évidence des effets thérapeutiques (voir encadré).

Le tableau ci-dessous figurant dans le rapport du Pr ROQUES

remis au Sénat et à l’Assemblée Nationale afin d’évaluer

l’impact des principales drogues sur la santé mentale des

usagers (2002), permet de situer le cannabis.

Objectifs de la

légalisation

Il s’agirait d’autoriser la vente au détail, de façon très

encadrée, aux personnes majeures, de cannabis et de

produits dérivés, issus de cultures elles-mêmes très

contrôlées, avec des caractéristiques et une teneur en

principes actifs réglementées. La vente serait soumise à

une licence avec un contrôle des entrées et des sorties.

Ainsi, tout trafic qui n’entrerait pas dans les critères définis

par la réglementation tomberait sous le coup de la loi pénale.

L’usage serait également extrêmement encadré et réprimé

notamment dans l’espace public ou lors de la conduite.

Enfin, l’objectif principal avancé est la mise en place

d’importants dispositifs de prévention (comme pour le tabac ou

l’alcool), puisque les usagers pourront légalement être touchés

et ciblés par les mesures, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui.

Gérer l’après...

dès aujourd’hui ?

Au cours de ces dernières années ont été levées la

prohibition sur l’alcool, les jeux d’argent, les paris en

ligne... Si la légalisation du cannabis devait être effective,

cela reviendrait à soustraire d’autant les revenus des

réseaux mafieux et terroristes. La production d’un kilo de

cannabis revient à 1 000 euros et le gramme est revendu

entre 4 et 10 euros, soit 4 000 à 10000 euros le kilo.

Il est quasi certain qu’il sera possible d’observer un report

du trafic sur des drogues dures et plus rentables, ou voir

l’émergence d’une nouvelle criminalité. En effet, selon la

fédération internationale de l’industrie du médicament,

1000 euros investis rapportent 20000 euros dans le trafic

de drogues, 43 000 dans le trafic de cigarettes et jusqu’à

400000 euros dans le trafic de médicaments falsifiés. La

pénalisation du trafic de drogue est de 30 ans de prison,

celle du médicament falsifié 7 ans au maximum (en France).

Ce dernier trafic est donc beaucoup plus rentable et moins

pénalisé. Selon les dernières statistiques de l’OMS il aurait

doublé en 5 ans et il atteindrait aujourd’hui pratiquement

la même « chiffre d’affaires » que le trafic de stupéfiants...

LE CANNABIS THÉRAPEUTIQUE

(THC ET/OU CBD)

Prévention des nausées et vomissements

(chimiothérapies, traitements VIH)

Traitement de la douleur (arthrose,

hernie discale, fibromyalgies...)

Traitement d’appoint des pathologies

neurologiques (sclérose en plaques,

maladie d’Alzheimer, maladie de Parkinson)

Anorexie, glaucome, asthme allergique,

syndromes inflammatoires, pathologies

cardiovasculaires.

0 = Nul 3 = moyenne

1 = Très Faible 4 = Forte

2 = Faible 5 = Très forte

héroïne

cocaïne

Psycho

stimulants

alcool

benzo

diazépine

cannabis

tabac

Dépendance physique

5

2

2

5

3

2

4

Dépendance psychique

5

4

3

5

4

2

5

Neurotoxicité

2

4

4

4

0

0

0

Toxicité générale

4

4

4

4

1

1

5

Dangerosité sociale

5

5

2

4

2

2

1

Traitements substitutifs

oui

oui

non oui

non

non

oui